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Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/26

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Louis se voyait avec sa future ouvrière : par la porte de la route, ouverte sur des prés et des arbres, entrait Lévise, tandis que derrière elle le ciel bleu, les feuillages verts remplis de soleil, les fleurs rouges et jaunes semées dans l’herbe, formaient un fond joyeux et rempli d’harmonie. Et Louis prenait la jeune fille par la main et commençait avec elle la plus longue, la plus douce, la plus chaste des conversations.

Louis se prépara si bien à cette petite fête que, ne pensant plus qu’Euronique prendrait à la lettre le contre-ordre donné à la fin de leur discussion, il attendit, le matin suivant, l’arrivée de la jeune fille. Étonné, impatient, inquiet, après avoir longtemps « tournaillé » dans la maisonnette pour tromper son attente, Louis finit par appeler Euronique.

— L’ouvrière (il tenait à honneur de paraître désintéressé aux yeux de la servante, et en même temps ne pouvait dissimuler la vérité), l’ouvrière, dit-il, n’a donc pu venir ?

— Comment venir ? répondit la batailleuse Euronique, on n’a pas été la chercher, pour qu’elle vienne.

— Je vous ai pourtant dit d’aller chez elle, reprit Louis.

— Oui, et ensuite de ne pas y aller, répliqua l’impitoyable servante.

Louis était vaincu, la servante avait le droit pour elle. Il ne sut s’en tirer que par une nouvelle colère.

— Vous ne voulez plus me servir, à ce qu’il paraît ! s’écria-t-il.

— Oh ! j’y vais tout de suite, et je la ramène. Seulement monsieur dit tantôt blanc, tantôt noir !

Là-dessus Euronique fit mine de s’élancer au-dehors.

Ses critiques, son empressement moqueur calmèrent Louis, qui tourna sa colère contre lui-même et se résigna