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Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/312

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duquel aucune parole ne pouvait se faire entendre. Ce fut en ce moment qu’arriva le capitaine. Il voulut attirer la jeune fille en arrière, mais elle s’attacha des deux mains à la barre d’appui de la croisée, et il ne put lui faire lâcher prise. Il fallait qu’elle leur jetât à la figure ce flot de mots violents qui se pressaient dans sa gorge.

Les paysans prirent d’abord le capitaine pour Louis, mais quelques-uns le reconnurent : Eh ! le capitaine, dirent-ils.

— Mes amis ! cria le capitaine, retirez-vous, vous n’avez pas le droit de troubler le repos public. Vous pourriez vous en repentir.

Une salve d’exclamations moqueuses l’accueillit : Il est de la famille, c’est le compère à la Hillegrin, c’est le mitron ! etc. On leur fit des grimaces, et la chanson recommença avec de nouveaux hurlements.

À travers cette espèce de tonnerre, le capitaine et Lévise entendirent cependant les coups frénétiques que Louis donnait dans la porte pour la faire céder.

— Fermez, mais fermez donc ! disait le capitaine à la jeune fille qui attendait un apaisement du bruit pour prendre sa revanche et frapper à son tour. Il essaya de ramener un des contrevents, elle rejeta le volet contre la muraille d’un mouvement violent.

— Mais vous êtes tous des fous ! s’écria le capitaine perdant tout espoir de venir à bout de ces énergumènes !

— N’êtes vous pas honteux de vous mettre quarante pour insulter une femme ? lança-t-il de toute sa force.

L’abominable tapage ayant un peu faibli, la voix de Lévise partit comme une flèche aiguë :

— Qu’est-ce qui a le droit d’être ici ? Il n’y en a pas un seul ! Tenez, continua-t-elle en les montrant du doigt successivement capitaine, en voilà une qui s’est fait avorter