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Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/40

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— C’est… à cause… de vous !… Telles furent les paroles qui sortirent enfin des lèvres tremblantes de Lévise.

Louis fut littéralement étourdi par ces trois mots qui lui apparurent comme un éclair éblouissant.

N’était-ce pas le cri de l’amour qu’il venait d’entendre ? Cette note dont il ne connaissait même pas l’écho ! cette musique qui lui avait été cachée jusqu’alors, malgré ses recherches, ses supplications secrètes au ciel. Louis en devint presque aussi tremblant que la jeune fille. Un trouble extraordinaire l’agitait. Il regardait Lévise sans la voir. Son cœur battait violemment, et il sentait comme des entraves se rompre dans son sein, sous l’effort et le tumulte intérieur du sang.

Mais, ainsi qu’un mendiant qui apprend la nouvelle subite d’un héritage, Louis n’osait croire à une telle bienveillance de la destinée. La défiance et le long découragement de sa jeunesse dressaient devant lui, pareille à un fantôme, la crainte d’une déception amère ! Il ne voulait pas y croire !

Avait-il bien compris ? N’était-ce pas par inexpérience qu’il s’était imaginé entrevoir dans les paroles de Lévise un « aveu », une « déclaration ».

Quoi ! cette paysanne qui pleurait sur sa chaise pleurait pour lui ? Et, dans ce cœur humilié et doux, tout appartiendrait à Louis ? C’était trop. Il devait se tromper. Il ne pouvait pas avoir tant de bonheur !

Les nerfs de Louis furent ébranlés si profondément que, frémissant, touché jusqu’à la moelle des os, il ne chercha plus qu’à détourner l’entretien de ce sujet qui l’émouvait trop fortement, et remit au lendemain, à plus tard, la confirmation de son espoir ou de sa crainte.

Il feignit donc, pour mettre fin à l’étrange et nouveau