Aller au contenu

Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/42

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

retenir dans des pensées de tendresse, souvent funestes pour les jeunes filles… Mais, en cela même, Louis ne s’apercevait pas combien il était enveloppé par ces pensées !

À ce moment, Louis aurait voulu être seul pour se replier un peu en lui-même et réfléchir sur les « immenses » événements qui venaient de se passer.

La présence de Lévise prolongeait pour Louis l’émotion, le trouble nerveux. Ne voulant rien lui confier de ce qui l’agitait, il ne pouvait en parler pour ainsi dire qu’avec lui-même. Ce n’était que seul qu’il pouvait repasser les petites scènes qui s’étaient déroulées depuis son arrivée à Mangues, les analyser, en jouir. Et c’était bien là ce qu’il voulait : rechercher dans ces scènes des indices où il puiserait davantage la croyance que la jeune fille l’aimait. Il voulait peser encore les sourires et les saluts de leurs premières rencontres, et chacun des mots prononcés, chacun des gestes faits pendant la journée.

Louis voulait compter son bien.

Lévise, d’ailleurs, lui semblait fatiguée.

— Vous ne devez pas être très-disposée à travailler, lui dit-il, il vaut mieux que vous rentriez pour vous reposer. Ne continuez pas ! Demain vous reprendrez votre ouvrage.

Louis entendait depuis un instant, à la porte, un bruit à peine distinct. Se doutant de l’affaire, il y courut sur la pointe du pied, et l’ouvrit brusquement.

Madame Euronique qui était là, écoutant de toute son oreille droite, fit un saut en arrière et s’en alla, feignant de passer dans une autre pièce.

Lévise ploya le linge et dit à Louis : — Bonsoir, monsieur ! d’une voix un peu plus ferme qu’elle ne l’avait eue jusqu’alors.