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Page:Duranty - La Cause du beau Guillaume.djvu/69

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pensait que Lévise éprouverait une certaine amertume, s’il affectait de jouer le rôle d’un bourgeois aisé, payant froidement les heures employées à raccommoder le linge, chute glaciale et décourageante après les « aspirations » !

— Combien vous dois-je, mademoiselle ? lui demanda-t-il, le soir.

— Trois francs, répondit Lévise naturellement et tranquillement.

— Et vingt-quatre sous que vous avez avancés pour le tabac, ajouta Louis, étonné du résultat négatif de son expérience.

— Oui, monsieur, dit Lévise qui ne parut pas émue.

— Les voilà !

La jeune fille tendit sa main et l’argent résonna joyeusement en tombant dans sa poche.

Louis fut d’abord contrarié de l’insuccès de sa tentative, mais il réfléchit et se dit : Je ne suis qu’un être à la fois subtil et borné ! Elle a besoin de son argent et le prend avec plaisir. Je reçois une leçon de simplicité ! Et je n’ai seulement pas eu encore la pensée d’offrir à Lévise un cadeau en guise de remercîment, un cadeau qui puisse être agréable à une femme !

Mais il eût été bien que Louis connût un peu mieux les goûts, les habitudes de la jeune fille. Il ne savait pas encore où elle demeurait, n’avait aucune notion sur l’intérieur de la maison des Hillegrin. Peut-être Lévise cachait-elle une détresse qui demandait secours ! Assurément un petit ornement de toilette pouvait lui plaire, mais n’y avait-il pas mieux à faire pour elle ? Comment Louis ne s’en était-il pas encore sérieusement occupé ? Il n’avait pensé qu’à lui !

Un quart-d’heure après ses réflexions, le jeune homme