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Page:E. Feydeau - Souvenirs d’une cocodette, 1878.djvu/121

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D’UNE COCODETTE


monde ». Mes parents me disaient que le moment était venu de songer sérieusement à me marier. À cette idée, mille ambitions confuses s’éveillaient en moi. Je pensais toucher au bonheur.

Quand il s’agit de me produire, ma mère m’annonça l’intention de donner quelques soirées et de me prendre avec elle pour faire des visites. Moi, je voulais débuter par un coup d’éclat, et, fort heureusement, malgré les finasseries du Gobert, qui voulait tout régenter à la maison, ce fut mon opinion[1] qui prévalut dans le conseil de famille. Tout le monde s’entretenait alors à Paris des bals de l’Hôtel-de-Ville. La vogue dont ils étaient l’objet provenait aussi bien de l’affluence de jolies femmes qui s’y portaient que de l’élégance des toilettes « à tout casser » qu’on y étalait. Chaque bal nouveau était signalé par l’apparition de quelque nouvelle beauté et de quelque mode nouvelle. Avec l’esprit de résolution dont je fis toujours preuve par la suite, ne pouvant jamais être tentée que par quelque chose de grand et de hardi, le bal de l’Hôtel-de-Ville fut le champ que je choisis pour livrer ma première bataille, et pour la gagner.

Et je la gagnai.

Je m’y préparai quinze jours à l’avance en donnant à ma santé des soins tout particuliers,

  1. Variante, ligne 11, au lieu de opinion ; lire : avis.