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Page:E. Feydeau - Souvenirs d’une cocodette, 1878.djvu/194

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SOUVENIRS


là. Elle est tout entière dans ce fait que tu es plus grande qu’elle, qui, cependant, est déjà si grande.

Si tu veux suivre mes conseils, tu l’éclipseras par ton défaut même. Entre nous, sans vouloir te faire un sot compliment, il est évident que tu es trop grande. Pour un observateur, il y aura toujours un défaut de proportion entre l’élévation de ta taille et celle de la moyenne des femmes que l’on rencontre. Tes formes sont très élégantes, minces, sveltes ; c’est dans ces formes élégantes et dans ta taille si grande, trop grande, que consistent ton originalité et ton plus grand charme.

C’est donc par là, en exagérant ton défaut, le poussant à l’excès, accentuant son originalité, c’est en faisant de ce défaut une qualité, une beauté, que tu dois vaincre et que tu vaincras.

Si tu étais jamais assez mal inspirée pour chercher, par ta manière de t’habiller, de te tenir et de marcher, à réduire ta taille, à la ramener aux dimensions ordinaires, tu perdrais tout ton charme, tout ton chic, devrais-je dire afin de me faire mieux comprendre, et, cherchant à corriger un défaut précieux, tu ne parviendrais qu’à te suicider. Je termine, ma chère Aimée, en résumant tout ce que je t’ai dit dans un seul principe : « Tu es trop grande : pour réussir, il faut que tu te grandisses encore. »

Telles étaient les préoccupations les plus vives