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Page:E. Feydeau - Souvenirs d’une cocodette, 1878.djvu/267

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D’UNE COCODETTE


reux en trépignant, ou, du moins, je ne le peux plus, maintenant. Je suis ensorcelé. Je ne sais pas ce qui m’arrive.

Il avait l’air si malheureux que, malgré moi, je commençais à avoir pitié de lui.

— Je vous en prie, ajouta-t-il soudain, mettez-moi en état de vous posséder à l’instant même, je vous donnerai cent mille francs de plus.

La scène qui, d’abord, avait été grotesque, touchait au tragique. Je pensai que, pour triompher, je n’avais autre chose à faire que de succomber. La parole donnée, l’argent reçu, rendu, repris, m’en faisaient un devoir, une nécessité.

Je succombai donc, avec grâce, même avec bonne grâce. Le baron fut heureux. Il me le dit, du moins.

Il est certain qu’il avait retrouvé la vigueur. Cependant, je ne lui avais épargné ni mes gaucheries calculées, ni même mes ruses[1].

Il y a des personnes qui ne se confessent que dans l’unique but de se disculper. Quelques-unes cependant, les confessions de J.-J. Rousseau sont là pour le prouver, semblent prendre un certain plaisir à s’accuser et se condamner. Je ne dois être rangée ni parmi les unes, ni parmi les autres. Je rédige ces mémoires uniquement pour me donner la satisfaction de m’examiner. Qu’y a-t-il

  1. Variante, ligne 19, au lieu de ruse ; lire : larmes.