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Page:Edmond Régnier - Histoire de l'abbaye des Écharlis.djvu/98

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histoire de l'abbaye des écharlis

l’abbaye avec les héritages leur appartenant. Un inventaire des titres est également fait vers 1780[1]. Médiocre, il remplace cependant beaucoup de chartes disparues.

Leurs titres de propriétés ainsi réglés, il ne pouvait « venir à la pensée de l’abbé qui habitait » Reims[2] et « des religieux qui, depuis la restauration de l’abbaye, croyaient pouvoir compter sur des siècles d’avenir que, sous peu d’années, plus malheureux que leurs devanciers, ils seraient forcés de quitter ce beau domaine pour achever leur carrière dans la misère et sur la terre d’exil ! Plus clairvoyant était le modeste curé de Villefranche (l’abbé Lambinet) ; il voyait l’orage se former et grossir ; aussi, chaque année, il déposait ses tristes pensées et il inscrivait ses lugubres prévisions sur des registres qui devaient passer à la postérité, sur les registres de l’étal civil de sa paroisse. Voici ce qu’on lit à la fin du registre de 1787 : « Nisi conversi fueritis, gladium suum vibrabit. Arcum suum tetendit et paravit illum ! » (Psaumes VII, 13.) Si vous ne vous convertissez, il brandira le glaive. Il a bandé son arc, il est prêt à s’en servir. »

« Sur le registre de 1788, on lit : « Cum exarserit in brevi ira ejus, beati omnes qui confidunt in eo. (Psaumes II, 13.) Lorsque le feu de sa colère sera allumé, heureux ceux qui auront confiance en lui ! » Sur celui de 1789 : « Eece nationes convenerunt adversum nos ut nos disperdant… quomodo poterimus subsistere… nisi tu Deus adjuves nos ? (Macchabées, 1, III, 52 et 53.) Les peuples se sont réunis contre nous pour nous disperser ; comment pourrons-nous résister, Seigneur, si vous ne venez pas à notre secours ? » Sur celui de 1790 : « Venii hora ut omnis qui interficit vos, arbitretur obsequium se prœstare Deo (Jean XVI, 2.) Le moment est venu où celui qui vous mettra à mort croira faire une œuvre agréable à Dieu. » Et sur celui de 1791 : « Eritis odio omnibus propter nomen meum. (Luc, XXI, 17.) Tout le monde vous haïra à cause de mon nom, » Enfin, sur le revers de la dernière feuille de ce même registre, se trouve cette simple mention : « Le dimanche 23 janvier 1791, les prieur et religieux Bernardins de l’Ordre de Cîteaux, en exécution du décret des États généraux, sont sortis de leur monastère des Écharlis avec la

  1. H 651, registre.
  2. Salomon, Histoire de l’abbaye des Écharlis. Salomon a écrit à tort que l’abbé habitait Paris. Du Mauroux demeurait à Reims.