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Page:Eekhoud - Les Pittoresques, 1879.djvu/147

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La Guigne


À d’autres l’idéal. C’est un vivant modèle
Dont je vous dépeindrai jusqu’au moindre défaut.
Il importe avant tout que je reste fidèle
Au type rencontré dont je suis le héraut.
Après cela, lecteurs, prenez pour ce qu’il vaut
Ce poème où longtemps je ne parle que d’elle.

Ainsi, pour commencer, dans sa bouche d’enfant,
— Bouton de rose rouge humide de rosée, —
Grouillaient parfois des mots que la pudeur défend,
— Bave d’un noir crapaud sur cette fleur posée, —
Et parfois un juron cynique et triomphant
Sortait de son gosier en bruyante fusée.

Oui, Madame, la Guigne à ses heures sacrait
D’une petite voix de rossignol flûtée,
Et comme un chien hargneux se mettait en arrêt,
Et des taches de feu marbraient sa peau lactée,
Ou souvent sans colère, en riant, brune athée,
Au blasphème stupide elle ajoutait un trait.

Ses refrains favoris manquaient de poésie,
Bravant la chasteté comme le vieux latin.
J’ignore si des vers la rime était choisie ;