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Page:Eekhoud - Les Pittoresques, 1879.djvu/164

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La Guigne


Il faut qu’il se dépêche, et sur le lourd panier
Il se penche, le prend à deux mains et se cambre,
Les genoux bien serrés, l’élève sans plier.
Les muscles de ses bras se tordent ; pas un membre
Qui ne travaille alors. Ô poète de chambre !
Ta plume pèse-t-elle autant sur ton papier ?

Le faix est cependant au niveau de l’épaule ;
L’athlète l’y maintient après l’avoir assis ;
Puis, portant une main à la charge qui frôle
Les murs, marchant d’un pas qui n’a rien d’indécis,
Il grimpe, il monte, il glisse à travers les châssis,
Sur l’échafaud étroit, sur la poutre ou la tôle.

Sain et sauf il arrive au toit. Un mot grossier
Ne le rebute pas. De descendre il s’empresse
Pour remonter bientôt, mais chargé de mortier.
Brave et stoïque enfant ! le vent seul te caresse
De ses âpres baisers. Ta mère, la pauvresse,
A-t-elle vu durcir tes mains à ce métier ?