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Page:Eekhoud - Les fusillés de Malines, 1891.pdf/95

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LES FUSILLÉS DE MALINES

ou présentant ce luisant de couverte et d’émail, cet incarnat rissolé particulier à l’adolescence des rustauds flamands. Un fleur irrésistible de jeunesse, de santé et de bonne conduite illuminait ces physionomies à la fois viriles et touchantes ! Leur bataillon formait une masse fauve : pieds poudreux, jambes brunes, torses bleuâtres, faces épanouies, — au-dessus de laquelle luisardait l’arsenal hétéroclite des instruments de travail convertis en attirail guerrier. À eux tous ils possédaient bien dix fusils, pour la plupart hors d’usage, et c’est à peine s’ils emportaient de quoi charger ces armes de rebut. Les mieux lotis de la bande étaient Chiel le Torse et Rik l’Espiègle, tous deux armés d’une façon de canardière.

Le petit Tistiet, le pupille, ne trahissait pas encore la moindre fatigue après ces allées et venues, il paraissait même plus éveillé, plus alerte que jamais, quoique ses courses multipliées eussent mis ses petons en sang. Il marchait en tête, portant un drapeau taillé dans un rideau rouge de la ferme Tuytgen, sur lequel se détachait, en