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Page:Eliot - Daniel Deronda vol 2&3.djvu/341

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l’entretien qu’il eut avec lui, il avait dévoré sa colère en pensant à l’humiliation déversée sur sa nièce et sur ses parents les plus proches, par la divulgation de la liaison de son mari avec madame Glasher ; car le bon recteur avait la naïve conviction que sa nièce ignorait l’existence de cette femme et de ses enfants. Il n’en fut pas de même pour madame Davilow, qui vit là une explication de ce qu’il y avait eu d’inexplicable dans la conduite et dans les paroles de sa fille avant son engagement ; mais elle ne concevait pas comment Gwendolen avait pu être instruite de ce mariage de la main gauche, et de l’existence des enfants.

— J’espère que vous ne vous attendez pas à ce que je sois riche, maman, dit Gwendolen peu après la communication du recteur… Peut-être n’aurai-je rien !

Madame Davilow tressaillit, et, après un moment de réflexion, elle dit :

— Oh ! si, ma chérie ; tu auras quelque chose. Sir Hugo connaît le testament.

— Cela ne décide rien, s’écria brusquement Gwendolen.

— Pardon, ma chérie ; sir Hugo affirme que tu dois avoir deux mille livres de rente et la maison de Gadsmere.

— Ce que j’aurai dépendra de ce que j’accepterai. Mon oncle, pas plus que vous, ne doit chercher à me contrarier ou à me persuader là-dessus. Je ferai mon possible pour que vous soyez heureuse, mais je ne veux pas que l’on se mêle de ce qui a rapport à mon mari. Une rente de huit cents livres est-elle suffisante pour vous, maman ?

— Plus que suffisante, chère enfant. Pourquoi veux-tu me donner autant ? — Madame Davilow s’arrêta un instant et reprit : — Sais-tu à qui doivent revenir les biens et le reste de la fortune ?

— Oui, dit Gwendolen, en faisant un geste signifiant qu’il ne fallait pas insister ; je sais tout. C’est parfaitement juste, et je désire qu’il n’en soit plus jamais question.