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Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/144

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un étang aux bords fleuris de lis. Une fois l’esprit bien en repos sur le compte de bébé, après divers incidents terminés, Célia, vêtue de sa robe de mousseline blanche et coiffée de boucles légères se mit à plaindre tout haut Dodo du supplice qu’elle devait endurer dans sa robe noire et son étroit bonnet. Elle était assise depuis quelque temps, agitant son éventail, lorsqu’enfin de son petit ton calme et saccadé :

— Chère Dodo, dit-elle, enlève donc ce bonnet. Je suis sûre que ta robe te rend toute malade.

— Je suis si habituée à ce bonnet, il est devenu pour moi une sorte de coquille, répondit Dorothée en souriant. Il me semble que je suis comme dévêtue et que je m’offre en spectacle, quand je ne l’ai pas.

— Il faut que je te voie sans ce bonnet ; il nous donne chaud à tous, dit Célia déposant son éventail et allant à Dorothée.

Cela faisait un joli tableau, cette petite lady en mousseline blanche, enlevant son bonnet de veuve à sa sœur plus majestueuse et le jetant au loin sur une chaise.

Sir James entra dans la chambre juste au moment où Dorothée apparaissait avec ses tresses brunes délivrées de leur prison et retombant autour de sa tête. La voyant ainsi il fit un : « Ah ! » de satisfaction.

— C’est moi qui ai fait cela, James, dit Célia. Pourquoi Dodo se rendrait-elle ainsi esclave de son deuil ? Elle n’aura plus besoin de porter jamais ce bonnet avec ses amis.

— Ma chère Célia, dit lady Chettam, une veuve doit porter le deuil au moins pendant un an.

— Mais pas, si elle se remarie avant la fin de l’année, dit mistress Cadwallader, qui prenait plaisir à faire frémir sa bonne amie la douairière.

Sir James parut contrarié et se baissa pour jouer avec le petit chien de Célia.

— Cela, j’espère, est très rare, répliqua lady Chettam