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Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/22

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chercher, sans y regarder, dès que la santé des enfants réclamait un médicament, — occasions dans lesquelles les vieux médecins manquaient de zèle ; et toutes les personnes disposées à se servir ainsi de Lydgate aimaient à le croire habile dans son art. Les bonnes familles de Middlemarch n’allaient pas d’ailleurs changer de médecin sans raisons péremptoires et tous ceux qui avaient employé M. Peacock ne se tenaient pas pour obligés d’accepter un nouveau venu, qui très probablement ne le valait pas, sous le seul prétexte qu’il était son successeur.

Lydgate cependant n’était pas depuis longtemps dans la ville, que déjà on rapportait sur son compte assez de détails pour faire naître des espérances plus précises et transformer les divergences d’opinions en luttes de partisans.

Un bruit qui ne tarda pas à se répandre, c’est que Lydgate ne distribuait pas de drogues. C’était là une façon d’agir également blessante pour les chirurgiens apothicaires, parmi lesquels il se rangeait, et pour les médecins, aux yeux desquels c’était un privilège réservé aux docteurs médecins de Londres, de se faire payer des consultations sans fournir de médicaments. Mais Lydgate n’avait pas acquis assez d’expérience pour prévoir que ce serait les malades qui se sentiraient encore le plus blessés de la nouvelle voie qu’il voulait suivre, et un jour que M. Mawmsey, important épicier du Top-Market, qui n’était pas de ses clients, en causait avec lui, il fut assez inconsidéré pour lui donner en gros l’explication de ses raisons, marquant à M. Mawmsey que ce serait abaisser le caractère de ses confrères et en faire constamment tort au public que de leur faire chercher l’unique rémunération de leurs soins dans l’établissement de longues notes pour des potions et des mixtures.

— C’est ainsi que de véritables médecins, se donnant beaucoup de peine, peuvent arriver à faim peu près autant de mal que de purs charlatans. Pour gagner leur pain, ils