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Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/224

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blées religieuses, et prêchant dans les maisons particulières. De nouveau il se vit songeant que c’était bien sa vocation de se faire ministre et d’affronter les travaux des missionnaires. C’était là le plus heureux temps de sa vie. C’était le point qu’il eût choisi pour s’y réveiller et constater que le reste n’était qu’un rêve. Les gens parmi lesquels frère Bulstrode s’était fait remarquer n’étaient pas nombreux, mais ils l’entouraient de près, et si son influence ne s’exerçait que dans des limites restreintes, il n’en jouissait qu’avec une plus vive satisfaction. Il croyait sans effort à l’œuvre particulière de la grâce au dedans de lui et aux signes par lesquels Dieu marquait qu’il l’avait choisi pour être son instrument spécial.

Puis venait l’époque de transition : c’était alors le sentiment de joie qu’il avait éprouvé de sa situation nouvelle, de se voir, lui, orphelin, élevé dans une école commerciale de charité, invité à une jolie villa appartenant à M. Dunkirk, l’homme le plus riche de la congrégation. Il devint bientôt un des familiers de la maison, honoré pour sa piété par la femme, apprécié pour ses capacités par le mari, qui devait sa fortune à la prospérité de son commerce dans la Cité et dans le West-End. Ce fut l’origine d’un nouveau courant offert à son ambition, une double voie ouverte à ses projets, qui lui permettait de concilier l’emploi de dons religieux remarquables avec le maniement de brillantes affaires.

Bientôt se présenta, à n’en pas douter, la voie qui devait le mener au but. Un homme de confiance associé à la maison étant venu à mourir, personne ne parut plus propre à le remplacer que le jeune ami Bulstrode, s’il voulait bien accepter. Il devint ainsi le comptable de confiance de l’affaire. C’était un commerce de prêts sur gages, de l’espèce la plus magnifique en étendue et en profits ; mais, après s’être un peu familiarisé avec cette industrie, Bulstrode se rendit compte que ces profits magnifiques avaient leur source prin-