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Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/256

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se représenter comment elle pourrait jamais s’intéresser à la tournure de Mary dans sa robe de mariée ou être heureuse d’avoir des petits enfants qui auraient les traits des Garth. La réunion était gaie cependant et Mary particulièrement ; elle était heureuse, pour l’amour de Fred, que ses parents à lui devinssent meilleurs pour elle, et non moins heureuse de leur faire voir en quelle estime la tenaient des gens dont l’opinion devait avoir de la valeur à leurs yeux.

M. Farebrother fit la remarque que Lydgate avait l’air ennuyé et que M. Vincy évitait de parler à son gendre ; Rosemonde était parfaitement gracieuse et calme. Le vicaire, qui l’observa pour la première fois avec une attention particulière, vit bien que la présence de son mari la laissait absolument indifférente et qu’elle n’éprouvait rien de cet intérêt qu’une femme laisse toujours voir pour l’homme qu’elle aime, même lorsque l’étiquette la tient éloignée de lui. Quand Lydgate prenait part à la conversation, jamais elle ne le regardait, pas plus que n’eût fait une statue de Psyché au regard immuablement fixé d’un autre côté ; et lorsqu’il rentra au salon après une absence d’une heure ou deux, elle sembla ne pas s’apercevoir de cette entrée qui, dix-huit mois auparavant, eut produit sur elle l’effet d’un chiffre devant des zéros. Elle avait pourtant, en réalité, parfaitement conscience de la voix et des mouvements de son mari, et son air d’indifférence tout affable et gracieux était une manière d’être étudiée et voulue par laquelle elle satisfaisait son opposition intérieure contre lui sans manquer aux convenance.

Pendant que les dames se trouvaient réunies au salon avant le retour de Lydgate, qui avait été appelé au moment du dessert, mistress Farebrother avait dit à Rosemonde qui était debout à côté d’elle :

— Vous êtes souvent privée de la société de votre mari, mistress Lydgate.