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Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/289

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les mettre dans leur tort ou du moins faire naître dans le sentiment de la plus juste indignation un doute sur sa justice même. Il avait besoin, en modérant ses paroles, de se convaincre pleinement qu’il était dans son droit.

— Ne voyez-vous donc pas, Rosemonde, recommença-t-il, essayant d’être simplement grave et non plus amer, que rien ne peut nous être si fatal qu’un manque de franchise et de confiance entre nous ? Il est arrivé mainte et mainte fois que j’ai exprimé un désir arrêté, auquel vous sembliez avoir donné votre assentiment ; ce qui ne vous empêchait pas ensuite d’y désobéir en secret. Je ne peux jamais de cette manière savoir sur quoi compter. Il y aurait encore un peu d’espoir pour nous si vous vouliez le reconnaître. Suis-je un animal si déraisonnable et si emporté ? Pourquoi ne seriez-vous pas franche avec moi ?

Toujours le même silence.

— Voulez-vous seulement avouer que vous vous êtes trompée et me donner votre parole qu’à l’avenir vous n’agirez plus ainsi ? reprit Lydgate avec insistance. Mais il y avait dans sa voix quelque chose d’impérieux que Rosemonde fut prompte à saisir.

Elle parla avec froideur.

— Je ne puis certainement faire ni concession ni promesse en réponse à des paroles comme celles que vous m’avez adressées tout à l’heure. Vous avez parlé de mes agissements détournés, de l’intervention de mon ignorance et de mon faux assentiment. Je ne me suis jamais exprimée de la sorte envers vous et il me semble que c’est vous qui me devriez des excuses. Vous avez parlé de l’impossibilité de vivre avec moi. Certes, vous ne m’avez pas rendu la vie agréable ces derniers temps. Est-il si extraordinaire que je m’efforce de prévenir quelques-unes des misères que notre mariage a attirées sur moi ?

Une autre larme tomba au moment où Rosemonde cessa