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Page:Eliot - Middlemarch, volume 2.djvu/391

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mains plus énergiquement encore qu’elle n’en avait l’habitude, c’était une précaution prise contre un trop grand laisser-aller de paroles. Elle était résolue à ne pas demander de nouvelles de M. Bulstrode.

— Je n’ai été nulle part qu’à l’église, depuis près d’une semaine, dit mistress Bulstrode après quelques propos préliminaires. M. Bulstrode est rentré tellement malade de la réunion de jeudi dernier que je n’aimais pas à quitter la maison.

Mistress Hackbutt, tout en se reprenant à frotter l’une contre l’autre les mains qu’elle tenait appuyées sur la poitrine, laissa errer ses regards sur le dessin du tapis de la cheminée.

— M. Hackbutt était-il à la réunion ? poursuivit mistress Bulstrode.

— Oui, il y était, dit mistress Hackbutt sans changer d’attitude. Le terrain sera acheté par souscription, je crois.

— Espérons qu’il n’y aura plus de cas de choléra à y enterrer, dit mistress Bulstrode. C’est une terrible visite. Mais je trouve toujours que Middlemarch est un endroit très sain. Cela vient, je suppose, de ce que j’y ai été habituée depuis l’enfance ; mais je n’ai jamais vu de ville où j’aimasse mieux à vivre, et surtout du côté que nous habitons.

— Certes, je serais heureuse que vous puissiez vivre toujours à Middlemarch, mistress Bulstrode, répliqua mistress Hackbutt avec un léger soupir. Cependant, il faut apprendre à nous résigner, quel que soit le lieu où le sort nous jette. Bien que je sois persuadée qu’il y aura toujours des gens dans cette ville, qui vous voudront du bien.

Mistress Hackbutt brûlait d’ajouter : « Si vous me consultiez, vous quitteriez votre mari », mais il lui paraissait clair que la pauvre femme ne savait rien de la foudre prête à éclater sur sa tête, et elle-même ne pouvait faire davantage que de la préparer doucement. Mistress Bulstrode se sentit