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Page:Emery - Douces amies, 1920.djvu/173

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DOUCES AMIES

épouvante, tu te souviens ?… Tu te penchas vers moi, les yeux remplis d’angoisse, tes petites mains s’appuyèrent sur ma poitrine… et ta voix soupira : Comme ton cœur bat fort… Ami, tu me fais peur, je ne veux plus t’aimer si tu t’affoles ainsi. Dans le silence, j’entends le galop furieux de tes désirs… Viens, viens ! Ne souffre plus…

Ah ! je te vois encore… Tu t’étais évadée… Puis ton corps s’inclinait mollement, gracieusement, sur un divan couvert d’une épaisse toison fauve. Et la blancheur rosée de ton image resplendissante aussitôt m’attirait. Je me traînai vers toi, toujours agenouillé.

Quand, plus tard, je cherchai la lumière de tes yeux, j’y découvris, Marcelle, de tels resplendissements que j’en fus ébloui. Alors, je retombai, ma bouche sur ta bouche. Et nous avons vécu alors des minutes, des heures de miracle, tellement écrasés par la béatitude, que je n’avais pas même la force de te remercier…

Mais un effroi soudain secoua ma torpeur…

Toi, qui m’avais donné l’infini du bonheur, étais-tu montée avec moi dans la joie ?… Tes yeux s’étaient fermés, lorsque je m’envolais. Et quand j’avais jeté ces cris de ravissement que l’assomption nous arrache, ta bouche close, ô sphynge ! avait gardé son secret…