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Page:Emery - Douces amies, 1920.djvu/225

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DOUCES AMIES

promenait le triomphe de ses fières passions à travers le monde des Très Belles, ah ! je me souviens comme je les dédaignais ces vieux hommes qui ne voulaient pas renoncer à la douceur d’aimer…

« Dieu me garde, disais-je, de devenir jamais semblable à ces vieux lovelaces à cheveux gris, à tête déjà branlante ! Mais non, je reculerais devant le ridicule, et si la tentation maîtrisait mon cerveau et ma chair débile, eh bien, j’aurais un beau geste : je m’armerais d’un sécateur, je couperais l’amour sénile dans ses vives racines… »

Mais ce n’est pas en bas, je le sens maintenant, qu’il faut trancher ; le mal est plus haut. C’est au cœur ; oui, c’est au cœur qu’il étend ses ravages…

Riez, riez, ô jeunes ! Diffamez comme il convient nos soleils d’arrière-saison. Soyez impitoyables, en attendant l’heure où vous serez, à votre tour, également vaincus !… Oui, oui, je vous le jure, dans nos vieilles amours, c’est le cœur seul qui palpite, qui vit, qui souffre, qui jouit…

Non pas que la chair soit impuissante. Les belles vaillances nous sont encore permises ; — au point de vue de la prouesse charnelle, nous égalons souvent les jeunes… Mais nous savons…