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LES ROUGON-MACQUART

Dans la rue, Octave comprit qu’il venait de se conduire comme un sot. Quatre heures sonnaient, le gai soleil printanier jaunissait tout un angle de la place Gaillon. Et, furieux contre lui-même, il descendit au hasard la rue Saint-Roch, en discutant la façon dont il aurait dû agir. D’abord, pourquoi n’avait-il pas pincé les hanches à cette Gasparine ? C’était ce qu’elle demandait sans doute ; mais il ne les aimait pas, comme Campardon, à ce degré de sécheresse ; puis, il se serait peut-être mal adressé encore, car celle-là lui semblait une de ces particulières d’une vertu rigide avec les messieurs du dimanche, lorsqu’elles ont un homme de semaine qui les met sur le flanc, du lundi au samedi. Ensuite, quelle idée jeune, d’avoir voulu quand même devenir l’amant de la patronne ! Ne pouvait-il donc faire son affaire d’argent dans la maison, sans exiger d’y trouver, tout à la fois, le pain et le lit ? Un instant, très combattu, il fut sur le point de retourner au Bonheur des Dames, avouer ses torts. Puis, la pensée de madame Hédouin, si tranquillement superbe, réveilla sa vanité souffrante, et il redescendit vers Saint-Roch. Tant pis ! c’était fait. Il allait voir si Campardon n’était pas dans l’église, pour l’emmener au café prendre un madère. Ça le distrairait. Il entra par le vestibule où s’ouvre une porte de la sacristie, une allée noire et sale de maison louche.

— Vous cherchez peut-être monsieur Campardon ? dit une voix près de lui, comme il hésitait, fouillant la nef du regard.

C’était l’abbé Mauduit, qui venait de le reconnaître. L’architecte étant absent, il voulut absolument faire visiter au jeune homme les travaux du Calvaire, pour lesquels il se passionnait. Il le mena derrière le chœur, lui montra d’abord la chapelle de la Vierge, aux murs de marbre blanc, et dont l’autel est surmonté du groupe