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LES ROUGON-MACQUART

dait, le regardait, et il ne perdait pas de vue les quatre pauvres meubles de la piqueuse de bottines, comme si l’homme tant cherché allait partir enfin dans un tiroir.

À midi moins un quart, l’ouvrière parut, avec son visage de cire, sa tristesse continuelle, son morne abandon. Elle pouvait à peine marcher. M. Gourd trembla, tant qu’elle ne fut pas dans la rue. Au moment où elle lui remit la clef, Duveyrier justement débouchait du vestibule, si brûlant de sa nuit, que les taches rouges de son front saignaient. Il affecta un air rogue, une sévérité d’implacable morale, lorsque le ventre de cette créature passa devant lui. Elle avait baissé la tête, honteuse, résignée ; et elle suivit la petite voiture, elle s’en alla, du pas désespéré dont elle était venue, le jour où elle s’était engouffrée dans les draps noirs des Pompes funèbres.

Alors, seulement, M. Gourd triompha. Comme si ce ventre emportait le malaise de la maison, les choses déshonnêtes dont frissonnaient les murs, il cria au propriétaire :

— Un bon débarras, monsieur !… On va donc respirer, car ça devenait répugnant, ma parole d’honneur ! J’ai cent livres de moins sur la poitrine… Non, voyez-vous, monsieur, dans une maison qui se respecte, il ne faut pas de femmes, et surtout pas de ces femmes qui travaillent !