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POT-BOUILLE

la pelle ; et il ne pouvait pas dire non, car elle le tenait d’Alphonse lui-même.

— Vous savez, mon vieux, ajouta-t-elle, si vous venez pour godailler, vous pouvez prendre la porte… C’est fini, la vie d’autrefois. À présent, je veux qu’on me respecte.

Et elle étala sa passion du comme il faut, grandie, tournée à l’idée fixe. Elle avait ainsi chassé un à un les invités de son amant, prise de véritables accès de rigorisme, défendant de fumer, voulant être appelée madame, exigeant des visites. Son ancienne drôlerie de surface et d’emprunt s’en était allée ; et elle ne gardait que l’exagération de son rôle de grande dame, qui parfois crevait en gros mots et en gestes canailles. Peu à peu, la solitude se faisait de nouveau autour de Duveyrier : plus d’intérieur amusant, un coin de bourgeoisie féroce, où il retrouvait tous les ennuis de son ménage, dans de l’ordure et du vacarme. Comme disait Trublot, on ne s’embêtait pas davantage rue de Choiseul, et c’était moins sale.

— Nous ne venons pas pour vous, répondit Bachelard qui se remettait, habitué aux réceptions vives de ces dames. Il faut que nous parlions à Duveyrier.

Alors, Clarisse regarda l’autre monsieur. Elle crut reconnaître un huissier, sachant qu’Alphonse commençait à se mettre dans de vilains draps.

— Oh ! après tout, je m’en moque, dit-elle. Vous pouvez bien le prendre et le garder… Pour le plaisir que j’ai à lui soigner ses boutons !

Elle ne se donnait même plus la peine de cacher son dégoût, certaine d’ailleurs que ses cruautés l’attachaient à elle davantage.

Et, ouvrant une porte :

— Allons ! viens tout de même, puisque ces messieurs s’obstinent.