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Page:Encyclopédie méthodique - Arts aratoires, T01.djvu/45

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BRO BRO 29


ou au commencement d'avril, soit que l'arbre soit couvert ou non de paillassons : cette maladie vient de ce que la terre, échauffée par quelques beaux jours, fait monter la sève avec abondance. Un vent froid, une gelée survient, la sève est tout-à-coup arrêtée dans sa circulation, & elle s'épaissit : de-là le recoquillement des feuilles & des bourgeons.

Il ne faut pas, aussi-tôt que les feuilles soit recoquillées, les arracher ; mais il faut attendre qu'elles commencent à sécher & à tomber, & quand vous Voyez qu'il en pousse d'autres. On met ces dernières feuilles dans un panier, avec celles qui sont déjà tombées, pour les jeter toutes au feu, & brûler par ce moyen les œufs de pucerons, qui, quoiqu'imperceptibles, sinon avec le secours de la loupe, sont dans ces feuilles recoquillées.

Quelques jours après cette opération, on jette bas les bourgeons rabougris, secs ou morts, & on fait une espèce de taille ; si les pêchers ont été fumés dans l’année, on jette de l'eau au pied, sinon on y met du terreau ou du fumier bien consommé.

Le pêcher se rétablit de la brouissure ; cependant cette maladie influe souvent sur les années suivantes. A la taille prochaine, il faut aller jusqu'à ceux des yeux qui ont poussé après coup, & qui n'ont point été cloqués : ce qui se connaît à la couleur noire du bois cloqué.

BROYE HOLLANDOISE. (Pl. LIV, fig. 1.) La broye hollandoise, ou l’instrument dont on se sert en Hollande pour broyer le lin, est composé de deux parties principales, l’une fixe & l'autre mobile. Ces deux parties font semblables à tout autre égard : elles sont formées de trois planches minces, ordinairement de hêtre, assemblées suivant leur longueur, & à de petites distances les unes des autres, dans de fortes pièces de bois. La partie mobile est supérieure, & disposée de manière que ses couteaux entrent dans les intervalles qui séparent ceux de la partie fixe ou inférieure. Celle-ci est soutenue à une hauteur convenable par quatre pieds solides, & la supérieure à un manche par lequel on l’élève & on l’abaisse ensuite. C'est par ce mouvement alternatif que le lin est broyé. Il est pressé avec force par le poids & par l'action du levier contre les couteaux ; il est serré entre les intervalles qui les séparent, & là, il est divisé & disposé à se détacher plus facilement de la chénevotte, par l’opération de l’espade.

Il est clair, par cette courte description de la broye & de son action, que les intervalles entre les couteaux n'en devroient pas beaucoup excéder l'épaisseur. Sans cela, le lin, au lieu


d'être pressé & divisé entre les couteaux, seroit seulement froissé par leurs bords & coupé en travers, comme il arrive souvent avec de mauvaises broyes, ou par la mal-adresse de ceux qui s'en servent.

Le même effet arriveroit si les couteaux s'engageoient trop avant les uns dans les autres. Dans ce cas, le lin seroit enfoncé dans les intervalles en résistant aux tranchans avec beaucoup de force, & il recevroit un dommage considérable. C'est pourquoi, dans les broyes bien proportionnées, la pièce solide de bois est presque de niveau avec le bord des couteaux, & elle les empêche de descendre trop bas.

Voilà ce qu'on doit observer dans la construction & dans les proportions de la broye. Il y a une remarque essentielle à faire par rapport à son usage, qui a échappé jusqu'ici aux apprêteurs françois.

Ce n'est pas le coup qui broye le lin, il l’endommage toujours plus ou moins, & lorsqu'il est fort & preste, & que le lin ne cède pas sur le champ, il doit nécessairement le couper. Il est aisé d'en faire l’expérience : étendez fortement le lin sur les couteaux ; liez-le ensuite dans cette situation, afin qu'il ne puisse céder, & vous verrez que deux ou trois coups vifs suffiront pour le rompre. Le lin est broyé par la pression contre les couteaux. Cette pression est latérale, elle tend à diviser la filasse & non à la couper. L'apprêteur devroit donc rendre le coup aussi léger & la pression aussi forte qu'il est possible ; & c'est à quoi réussissent les Hollandois, en plaçant bien la poignée de lin sous la broye.

On sait, par les premiers principes de la mécanique, que la mâchoire supérieure de la broye agit avec plus de vitesse & avec plus de force en A qu'en B (Voyez pl. LIV, fig. 1.) ; que le coup y est plus preste & plus violent, & qu'il tend, par conséquent à endommager & à couper le lin. D'ailleurs la pression est moindre en A, elle finit avec le coup, & elle ne peut être augmentée ni diminuée. Ainsi lorsque le lin est placé en A. comme, il l’est presque toujours par les apprêteurs françois, toute l'opération se fait de la manière la plus destructive, par des coups continuellement répétés, qui rompent & qui coupent inévitablement la filasse. La pression, qui peut seule le diviser, n'a point lieu.

Le contraire arrive en B ; le coup est lent & foible, & la pression est aussi forte qu'il est possible. C'est pourquoi les Hollandois suivent une pratique contraire à la nôtre ; ils broyent toujours leur lin ; en B ; ils élèvent la mâchoire supérieure avec la main gauche en C, & ils