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Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/227

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L’AMI FRITZ.

ment pour une somme encore dix fois plus forte, à moins d’être tout à fait sûr. »

Alors David, regardant Kobus d’un œil extrêmement fin, répondit :

« Et tu feras bien, Schmoûle ; dans le doute, il vaut mieux s’abstenir. »

Le greffier avait inscrit le refus de serment, il se leva, salua l’assemblée et sortit avec Schmoûle, qui, sur le seuil, se retourna et dit d’un ton brusque :

« Je viendrai prendre les boeufs demain à huit heures, et je payerai.

— C’est bon, » répondit Christel en inclinant la tête.

Quand ils furent seuls, le vieux rebbe se mit à sourire.

« Schmoûle est fin, dit-il, mais nos vieux talmudistes étaient encore plus fins que lui ; je savais bien qu’il n’irait pas jusqu’au bout : voilà pourquoi je ne me suis pas habillé.

— Eh ! s’écria Fritz, oui, je le vois, vous avez du bon tout de même dans votre religion.

— Tais-toi, épicaures, répondit David en refermant la porte et reportant la Bible dans l’armoire ; sans nous, vous seriez tous des païens, c’est par nous que vous pensez depuis deux mille ans ; vous n’avez rien inventé, rien découvert. Réfléchis seulement un peu combien de fois vous vous êtes di-