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Page:Erckmann-Chatrian — L'ami Fritz (1864).djvu/23

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L’AMI FRITZ.

— La vingt-troisième que tu refuses de ma propre main, Kobus ?

— C’est vrai, David, avec chagrin, avec grand chagrin ; je voudrais me marier pour te faire plaisir, mais tu sais… »

Alors le vieux rebbe se fâchait.

« Oui, disait-il, je sais que tu es un gros égoïste, un homme qui ne pense qu’à boire et à manger, et qui se fait des idées extraordinaires de sa grandeur. Eh bien ! tu as tort, Fritz Kobus ; oui, tu as tort de refuser des personnes honnêtes, les meilleurs partis de Hunebourg, car tu deviens vieux ; encore trois ou quatre ans, et tu auras des cheveux gris. Alors tu m’appelleras, tu diras : « David, cherche-moi une femme, cours, n’en vois-tu pas une qui me convienne. » Mais il ne sera plus temps, maudit schaude, qui ris de tout ! Cette veuve est encore bien bonne de vouloir de toi ! »

Plus le vieux rabbin se fâchait, plus Fritz riait.

« C’est cette manière de rire, criait David en se levant et balançant ses deux mains près de ses oreilles, c’est cette manière de rire que je ne peux pas voir : voilà ce qui me fâche ! ne faut-il pas être fou pour rire de cette façon ? »

Et s’arrêtant :

« Kobus, disait-il en faisant une grimace de