Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/172

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événement, à un homme. Individuellement, les hommes d’aujourd’hui sont aussi chatouilleux sur le point d’honneur que ceux d’autrefois : leurs duels en sont la preuve. D’ailleurs, la Colère et la Vengeance sont des passions vivaces dans notre cœur ; elles ne s’éteindront qu’avec notre race. Cette attitude ne tient pas davantage à ce que les rapports des peuples sont sauvegardés par des conventions justes ; l’équilibre européen n’équilibre rien.

Mais elle tient aux rapports organiques établis par nos institutions entre les diverses classes de la société. Nous traversons une période économique ambiguë, difficile. Le vieux Monopole est aux prises avec l’Égalité naissante, l’un est dans la législation, l’autre dans les tendances ; l’un a parcouru toute son évolution, l’autre n’a pas encore commencé la sienne. D’où résulte que des institutions qui n’étaient destinées qu’à faire le bonheur de quelques-uns sont tiraillées par tous et ne peuvent faire le bonheur de tous. D’où résultent, pour les classes qui vivent sur ces institutions en décadence, de grands désespoirs, d’extrêmes privations, l’imminence toujours renouvelées de la ruine et de la disette !

Les bourgeois crient : La Paix ! la Paix ! ! Et il n’y a point de paix. Le grand projet de Henri IV, de Sully et de Bernardin de Saint-Pierre est tombé dans les mains fourchues des marchands, marchands de coton et marchands de papier, Richard Cobden et Émile de Girardin ! — Les bourgeois sont fiers de ce que le français est répandu partout, de ce qu’il est reconnu langue officielle de la diplomatie. Et ils ne savent pas que lorsque la langue d’une nation se répand parmi les autres, c’est un signe certain que bientôt le sang de cette nation sera tiré de ses veines pour être transfusé dans celles de l’Humanité. — Les bourgeois célèbrent les grandeurs de la sacro-sainte civilisation du Monopole. Et ils ne s’aperçoivent pas que cette civilisation