Aller au contenu

Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/206

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Et puis, il y a derrière Nicolas un homme jeune, actif, instruit, ambitieux, entièrement Russe, seulement Russe, à qui la civilisation déplaît et qui s’appelle l’archiduc Constantin. Chroniquement diplomate, Nicolas pourrait, dit-on, renoncer à la tâche entreprise ? Je ne le crois pas. Que s’il le faisait cependant,.... alors.... Ce n’est jamais impunément, ce n’est jamais longtemps surtout qu’un gouvernement résiste aux vœux d’un peuple entier. Plus absolu est le pouvoir, plus terribles sont les dangers. Quand les existences de soixante millions d’hommes dépendent du caprice d’une seule tête, cette tête est à la merci de soixante millions de vengeances, de rages, de cordes et de poignards. Les aveugles ne connaissent pas le danger. Les sourds n’entendent aucune parole de conciliation, dès qu’ils s’aperçoivent qu’on les trompe. Malheur à ceux qui les conduisent mal ! C’est jusqu’aux cœurs des rois, jusqu’aux entrailles des seigneurs, jusqu’aux fondements des manoirs que les Cosaques portent le fer et le feu. Tandis que nous nous contentons dans nos plus grandes fureurs de brûler quelques meubles et d’enfumer des princes dans leurs palais. Le pouvoir de Nicolas est en équilibre sur la pointe d’une lance : c’est périlleux !...

Ou Nicolas continuera cette guerre, ou il ne la continuera pas ; c’est un détail secondaire. Ce qu’il y a de certain, c’est que cette guerre sera continuée par quelqu’un ; c’est que, pendant toute la fin de ce siècle, la Russie fera le sac de la Civilisation d’Occident : c’est qu’il le faut, et que jamais les instruments ne manquent à la Fatalité. Les hommes se servent des événements, mais les événements aussi se servent des hommes, et les trouvent, quand ils leur sont nécessaires. Le Russe est altéré de sang, civilisé, et le souverain qui s’en montrerait avare serait peut-être prodigue de son propre sang. Si j’étais Tzar de toutes les Russies pour le quart d’heure, je méditerais profon-