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Page:Ernest Cœurderoy - Hurrah !!!.djvu/306

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fréquent l’usage de ces expressions nouvelles, en même temps que les anciennes, devenues chaque jour moins nécessaires, tomberont en désuétude. Les rapports plus intimes entre les nations amèneront l’échange des idiomes divers. On conversera dans des termes imparfaits, inachevés ; on fera subir à la prononciation, à l’orthographe, à la grammaire d’innombrables altérations. Ainsi les langues actuelles seront envahies dans le sanctuaire de leurs règles absolues ; ainsi la confusion des peuples amènera la confusion des langues, l’anarchie dans la parole comme dans la pensée. Ici encore le Bien naîtra du Mal, l’Invention de la Faute. Et de cette anarchie, de ce patois général sortira la langue nouvelle et universelle. Car aucun progrès ne se réalise sans déchirement, sans révolution, souffrance et anarchie. La Langue universelle ne sera pas créée par un système, non plus que l’ordre universel. Les systèmes sont rentrés dans le domaine de l’anatomie pathologique.

De même pour les révolutions. — Les générations nouvelles, venues au monde au milieu de guerres continuelles, s’accoutumeront aux secousses, aux dangers et aux cataclysmes ; elles comprendront que la Révolution est imminente et permanente dans les sociétés, indispensable à leur conservation.

Quand une fois le mouvement est imprimé à l’Humanité, il ne s’arrête plus : un peuple déborde sur un autre peuple, et la houle se propage dans l’océan des hommes comme dans l’océan des vagues, jusqu’à ce que, de tous ces chocs, résulte l’Harmonie définitive. Ainsi, lorsque les flots se sont longtemps battus, ils s’affaissent par lassitude et s’étendent en paix sur la surface limpide des mers calmées[1].

  1. Sur des points aussi importants, je ne puis donner ici que l’indication de mes idées. J’y reviendrai plus en détail quand je m’efforcerai de reconstruire la société nouvelle avec tous ces décombres aujourd’hui répandus pêle-mêle sur le sol ébranlé.