Aller au contenu

Page:Espronceda - L’Étudiant de Salamanque, trad. Foulché-Delbosc, 1893.djvu/34

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

de ses yeux immobiles. Mais sans que la crainte ni la douleur qu’elle inspire arrêtent les pas hardis et impies de Montemar, il regarde Jésus face à face.

Il semble que la rue s’ébranle et chemine ; il sent la terre lui manquer sous les pieds ; ses yeux sont fascinés par le regard mort du Christ, violemment fixé sur lui.

Et au milieu du délire qui obscurcit son esprit et qu’il impute au vin qui a fini par l’enivrer, d’une main insolente il saisit la lampe sur l’autel où elle éclaire l’image de Dieu,

et l’approche brutalement du visage que recouvre le voile pudique ; mais, soudain, le vent éteignit la lumière et la blanche dame se dressa.

Alors il lui sembla un instant voir un visage qui lui rappelait peut-être confusément de vagues souvenirs et de joyeuses réminiscences de temps meilleurs déjà passés.

Un visage d’ange qu’il aperçut dans un rêve comme une sensation qui a caressé l’âme, couvrant le front d’un nuage de tristesse, incomprise à jamais de la raison.

La blanche robe que l’on voit flotter dessine dans l’ombre ses formes élégantes, et son pied glisse sans bruit comme si elle foulait de moelleux tapis.

Telle nous avons vu, sous les rayons de la lune, une voile fugitive croiser au loin, tantôt enflée en poupe par la brise sereine, tantôt confondue avec l’écume de la mer,

de même l’espérance, blanche et vaporeuse, passe devant nous comme une illusion, émeut l’âme d’une anxiété craintive, tandis que la sévère raison la repousse.

DON FÉLIX

« Quoi ! vous me laissez sans réponse ? Vous refusez ma compagnie ? C’est peut-être quelque vieille dévote ?… La chose serait plaisante !