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Page:Esquiros - Paris ou les sciences, tome 1.djvu/329

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dresse l’arme de la raillerie et rompu à la discussion, Gall répondait à ses adversaires moqueurs, par des argumens presque toujours sérieux. Encore moins se donnait-il la peine de battre en brèche les systèmes de ses voisins ; sa raison était qu’il ne tenait pas à jeter les fondemens de sa doctrine dans des ruines. Quand on lui parlait de la résistance de Napoléon à ses idées, il répondait sans s’émouvoir : « Le génie le plus élevé a toujours au-dessus de lui la vérité, comme l’aigle qui vole dans le ciel a au-dessus de lui la lumière. »

Cette résistance fut longue et tenace ; elle domina toute la destinée de Gall dans la science, comme celle de N. Lemercier dans les lettres. En vain Corvisart et Larrey essayèrent de faire revenir l’empereur sur le compte du savant : Napoléon se montra inflexible. Ses raisons, car il prit la peine d’en donner, étaient celles que l’on retrouve dans la bouche de tous les détracteurs de la phrénologie. Au milieu de ce grand duel moral que le docteur Gall eut à soutenir contre son ennemi anonyme, revenait sans cesse le reproche de matérialisme et de fatalisme. La vérité est que, comme tous les hommes qui voient juste et loin, l’empereur avait aperçu une philosophie derrière la découverte du médecin. En morale, en politique, en législation, la nouvelle science entraînait à ses yeux un monde nouveau. Au fond, l’empereur croyait lui-

    de ses forces, qu’il ait donné pour certains des résultats douteux, cela est possible : mais je ne crois pas chez lui à un dessein réfléchi de tromper. L’erreur en physiologie est une fille qui se retourne tôt ou tard contre son père : qu’eût-il donc gagné à l’adopter sciemment ?