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Page:Eugène Monseur - Le folklore wallon, 1892.djvu/30

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Il suffit de lire Bonjour, bonjour, Madame la Rose pour voir qu’il s’agit dans ce jeu de l’achat d’une femme. Les petites filles s’y partagent en deus groupes : le premier représente des prétendants qui viennent marchander des filles à leur mère ; l’autre, une mère accompagnée de ses filles et les cédant, une à une, sitôt qu’on lui en présente un pris convenable. Ce jeu est le dernier débris dans notre Occident d’un ancien mode de mariage, le mariage par achat. Une courte parenthèse sur ce que l’on sait actuellement de l’évolution de la famille servira à fixer des idées.

On admet aujourdhui comme une hypothèse excessivement vraisemblable dans sa généralité, — beaucoup de détails, toutefois, méritent encore une sérieuse étude[1] —, que primitivement toutes les femmes d’une tribu appartenaient à tous les hommes. Les enfants, issus d’unions plus ou moins éphémères, étaient avant tout les enfants de la tribu. Même constatée, la filiation maternelle et paternelle, paternelle surtout, produisait peu de conséquences juridiques. Avec le temps, il y eut bifurcation dans le développement de la famille.

Dans certaines tribus, la femme fut de plus en plus considérée comme le principal personnage de la triade familiale. De là, un état spécial de société que l’on désigne du nom de matriarcat, — il subsiste encore chez beaucoup de non civilisés —, et où l’ascendant féminin est le chef de la famille et les parents maternels, les cognati, les seuls vrais parents.

Dans d’autres tribus, bien probablement à cause de leurs

  1. Voir sur ce sujet l’intéressant ouvrage de Starcke, La famille primitive, qui élève des doutes très légitimes sur la première partie de l’hypothèse. On trouvera les principales conclusions de M. S. très bien résumées par M. Godenir dans Bulletin de folklore 1, 67-71.