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Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, I, 1884.djvu/188

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aux villes, et les alliés aux alliés. Un droit égal est, en effet, une loi naturelle entre hommes, et celui qui est moindre se dresse en ennemi de qui est plus élevé, et il prépare le jour de la lutte. Car l’égalité a donné aux hommes les mesures et les poids et a constitué le nombre. La nuit aux paupières obscures et la lumière de Hèlios parcourent également le cercle de l’année, et aucune d’elles, vaincue, n’envie l’autre. Ainsi donc, le jour et la nuit servent aux hommes ; et toi, tu ne souffres pas que celui-ci partage également la demeure et tu ne lui accordes point sa part ? Alors, où est la justice ? Pourquoi honores-tu au delà de tout la tyrannie, cette brillante injustice, et penses-tu qu’il est si beau d’être regardé et honoré ? Certes, cela est bien vain. Veux-tu éprouver tant de soucis, toi qui possèdes tant de choses dans ta demeure ? Qu’est-ce que l’abondance, si ce n’est à peine un nom ? Ce qui est nécessaire suffit aux sages. Ce n’est point par eux-mêmes que les mortels possèdent les richesses. Elles viennent des Dieux et nous en prenons soin, et, quand ils le veulent, ils les reprennent. La fortune n’est pas stable et dure un jour. Allons ! si je t’interrogeais, si je t’offrais l’alternative de régner ou de sauver la Ville ? Dirais-tu que tu veux régner ? Mais si celui-ci l’emporte sur toi, si les lances des Argiens dispersent l’armée des Kadméiones, tu verras cette ville des Thèbaiens domptée, tu verras de nombreuses vierges captives enlevées de force par les hommes ennemis. Ainsi, cette richesse que tu veux posséder sera funeste à Thèba, et tu ne seras qu’un ambitieux. Voilà ce que je te dis. Et, à toi, Polyneikès, je déclare ceci : Adrastos t’a imposé une reconnaissance imprudente, et tu es venu en insensé assiéger ta patrie. Mais quoi ? Si tu prenais cette