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Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, I, 1884.djvu/351

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je n’en ai jamais eu ni le désir, ni la pensée. Certes ! que je périsse, sans nom, infâme, exilé de la patrie, sans foyer, fugitif et vagabond sur la terre ; que ni la terre, ni la mer, ne reçoivent mes chairs mortes, si je suis un scélérat ! Pour celle-ci, je ne sais si la crainte l’a poussée à se tuer. Il ne m’est point permis d’en dire plus. Elle a gardé l’apparence de la chasteté, bien qu’elle n’ait pas su rester chaste. Moi, qui ai la chasteté, j’en ai usé plus malheureusement.

LE CHŒUR.

Tu as suffisamment réfuté cette grave accusation, en faisant serment par les Dieux.

THÈSEUS.

Est-ce un Épôde, ou un magicien, qui se flatte de fléchir mon âme par sa douceur, après avoir couvert son père d’opprobre ?

HIPPOLYTOS.

Je suis étonné d’une chose en toi, père ! En effet, si tu étais mon fils, et si j’étais ton père, certes, je t’aurais tué, et non puni de l’exil, si tu avais osé attenter à ma femme !

THÈSEUS.

Comme tu as bien parlé ! Mais tu ne mourras pas aussi aisément, en vertu de cette loi que tu t’appliques. Une prompte mort, en effet, est très agréable à l’homme malheureux. Mais, errant, exilé loin de la patrie, tu traîneras une misérable vie sur la terre étrangère. C’est ce qui est dû à l’homme impie.