Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, I, 1884.djvu/447

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Troia ne l’a point nommé un lâche comme toi ; il va où il faut qu’il aille, et il se montrera digne de Pèleus et de son père Akhilleus. Il chassera ta fille de ses demeures. Et toi, en mariant celle-ci à quelque autre, que diras-tu ? Qu’elle a fui un mauvais mari par pudeur ? Mais ce sera faux. Qui l’épousera ? La garderas-tu sans mari, veuve et vieillissant dans ta demeure ? ô homme misérable ! ne vois-tu pas les maux innombrables qui t’attendent ? Par combien de concubines ne voudrais-tu pas voir ta fille offensée, plutôt que de subir ce que je t’annonce ? Il ne faut pas, pour peu de chose, se préparer de grands maux, et si nous, femmes, nous sommes un tel fléau, les hommes ne doivent pas ressembler aux femmes. Pour moi, en effet, si j’ai empoisonné ta fille à l’aide de philtres, comme elle le dit, et rendu son ventre stérile, le voulant ainsi et n’y étant point contrainte, je ne m’attache plus à cet autel, et je me soumettrai au jugement de ton gendre qui ne m’infligera pas un moindre châtiment, à moi qui le prive de postérité. C’est ainsi que je pense. Mais je crains une chose seulement de toi : c’est pour une querelle de femme que tu as renversé la malheureuse ville des Phryges !

LE CHŒUR.

Tu as parlé trop audacieusement, toi, femme, à des hommes, et ta modestie a lancé trop loin les traits de ton esprit.

MÉNÉLAOS.

Femme, ceci est peu de chose en effet, peu digne de ma puissance, comme tu le dis, et de la Hellas ; mais, sache bien que, pour quelque homme que ce soit, obte-