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Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, I, 1884.djvu/527

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THÈSEUS.

Je voulais t’interroger quand tu te répandais en lamentations devant l’armée ; mais je tairai maintenant les questions qui te concernent, et je vais interroger Adrastos : Comment ceux-ci sont-ils devenus des hommes illustres par leur courage ? Dis-le à ces jeunes citoyens, étant plus sage qu’eux, car tu es plein d’expérience. J’ai su les actions, plus grandes qu’on ne peut dire, par lesquelles ils espéraient emporter la Ville. Cependant, il est une chose sur laquelle je ne te questionnerai pas, de peur d’exciter le rire, c’est-à-dire ceux contre qui chacun d’eux a combattu et dont la lance l’a blessé ; car ce sont de vaines paroles, pour qui écoute et pour qui parle, de vouloir raconter que tel guerrier, au milieu de la mêlée, ayant une foule de lances devant les yeux, s’est conduit bravement. Je ne pourrais ni interroger ni croire ceux qui oseraient dire de telles choses. À peine quelqu’un peut-il voir ce qui concerne sa propre sûreté, debout en face de ses ennemis.

ADRASTOS.

Écoute donc, car c’est bien volontiers que je louerai mes amis dont je veux dire des choses vraies et justes. Vois-tu celui-ci sur qui se précipite le trait de Zeus ? C’est Kapaneus. Il avait de grandes richesses, mais il n’en était nullement orgueilleux, et son esprit n’en était pas plus enflé que celui d’un homme pauvre, et il fuyait quiconque s’enorgueillissait d’une table abondante et méprisait une nourriture frugale. Il disait, en effet, que la vertu ne consiste pas dans l’assouvissement du ventre, et que peu doit nous suffire. C’était un véritable ami pour ses