Aller au contenu

Page:Euripide, trad. Leconte de Lisle, II, 1884.djvu/206

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
194
LES BAKKHANTES.

ces de Dirkè et des eaux de l’Isménos. Et je vois, non loin de cette maison, le tombeau de ma mère frappée de la foudre, et les ruines de ses demeures qui exhalent encore la vive flamme du Feu divin, éternelle vengeance de Hèra sur ma mère ! Je loue Kadmos d’avoir consacré à sa fille ce lieu inaccessible, et, moi-même, je l’ai ombragé de tous côtés des pampres feuillus de la vigne. Et j’ai quitté les champs riches en or des Lydiens et des Phryges, et les plaines ardentes des Perses, et les villes Baktriennes, et l’âpre terre des Mèdes, et l’Arabia heureuse, et toute l’Asia qui se baigne dans la mer salée et qui possède d’innombrables villes bien peuplées et fortifiées de tours, où habitent, confondus, Hellènes et Barbares. Et celle-ci est la première ville de la Hellas où je sois entré, après avoir conduit là-bas mes chœurs et célébré mes rites sacrés, afin de rendre manifeste aux hommes que j’étais un Dieu. Thèba est la première ville de la Hellas où j’ai fait retentir le hurlement des Bakkhantes, ayant enveloppé leurs corps de la nébride et mis en leurs mains le thyrse entouré de lierre. Et cela, parce que les sœurs de ma mère, contre toute justice, niaient que Dionysos fût le fils de Zeus, et disaient que Sémélè, ayant été surprise par quelque mortel, rejetait cette faute sur Zeus, par le conseil de Kadmos. Et elles affirmaient que Zeus l’avait tuée à cause de ce mensonge. Aussi, je les ai chassées, furieuses, hors de leurs demeures ; et, maintenant, elles courent en délire sur la montagne. Et je les ai contraintes de revêtir les signes de mes Mystères ; et j’ai chassé de leurs demeures les femmes des Kadméiens, furieuses aussi, toutes tant qu’elles sont, mêlées aux filles de Kadmos, et elles habitent sous le vert feuillage des sapins et sous les roches arides. Il faut, en effet, que