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Page:Eyma, Les peaux noires, Lévy, 1857.djvu/150

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qu’ils aient vent de quelque machination de ce genre, ils montent littéralement la garde autour de la victime, évitant avec un soin tout filial qu’elle ne boive ou ne mange que ce qu’ils lui offrent de leurs propres mains. Ils ont pour réussir une infinité de subterfuges et de ruses.

Si les domestiques de la maison sont d’accord avec les auteurs du crime sur le sort de la victime, ils deviennent complices par le laisser faire ; mais ils enveloppent dans cette même surveillance active, et impossible à prendre en défaut, les autres membres de la famille qu’ils ont résolu d’épargner.

Cette sûreté d’œil et de main, que déploient les nègres dans ces épouvantables occasions, est la cause du silence qu’ils gardent sur le crime. S’il s’accomplit, c’est que tout le monde est complice ; mais il suffit quelquefois d’une volonté énergique pour qu’il échoue.

Ce même dévouement se rencontre dans les grandes occasions de révolte à main armée des nuits de Noël, dont le but a toujours été le massacre des blancs. — La nuit de Noël est une date cabalistique pour les nègres. Une sorcière leur avait prédit, dans des temps bien reculés, que c’est ce jour-là qu’ils conquerraient leur liberté.

Presque tous ces complots formidables ont échoué devant l’affection de quelque esclave qui avait un maître à sauver, à épargner, et qui le venait prévenir en secret.

Là il n’y a pas, comme dans les cas d’empoisonnement, de précautions à prendre et de surveillance possible à exercer ; les coups sont directs, instantanés ; on ne peut les parer qu’en les dénonçant à l’avance. L’esclave fidèle n’hésite pas, alors, à le faire.

Ces dévouements isolés des esclaves, flottant au-dessus de la haine impitoyable que la race noire a vouée à la race blanche, est la sauvegarde de celle-ci. La lutte en nombre,