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Page:Féval - Le Bossu (1857) vol 1-3.djvu/181

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LE BOSSU.

C’était un cadeau étourdissant. Il y avait là-dedans des montagnes d’or.

Ce qu’il fallait d’abord, c’était faire de la place pour tout le monde, puisque tout le monde devait payer et même très-cher. — Le lendemain du jour où la concession fut octroyée, l’armée des démolisseurs arriva. On s’en prit d’abord au jardin.

Les statues prenaient de la place et ne payaient point : on enleva les statues ; les arbres ne payaient point et prenaient de la place : on abattit les arbres.

Par une fenêtre du premier étage, tendue de hautes tapisseries, une femme en deuil vint et regarda d’un œil triste l’œuvre de dévastation.

Elle était belle, mais si pâle, que les ouvriers la comparaient à un fantôme.

Ils se disaient entre eux que c’était la veuve du feu duc de Nevers, la femme du prince Philippe de Gonzague.

Elle regarda longtemps ; il y avait en face de sa croisée un orme plus que séculaire, où les oiseaux chantaient chaque matin, saluant le renouveau du jour, l’hiver comme l’été.

Quand le vieil orme tomba sous la hache, la femme en deuil ferma les draperies sombres de la croisée. On ne la revit plus.