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Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 1-2.djvu/259

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Sara fit une petite moue d’enfant, et prit les deux mains de son mari pour le relever.

— Voyons, dit-elle, est-ce fini ?…

Laurens porta ses deux mains à son front en feu.

— Madame, dit-il en se relevant d’une voix affermie par l’indignation, — je ne veux pas que vous sortiez !

Petite recula d’un pas et croisa ses bras sur sa poitrine. Son sein bondissait, son œil brûlait ; elle était effrayante à voir.

— Vous ne voulez pas !… répéta-t-elle d’une voix qui vibra longuement dans le silence de la chambre à coucher.

L’agent de change ne répondit point.

Durant une seconde, il soutint le regard fixe et perçant de sa femme. Puis ses yeux se baissèrent fascinés.

Le sourire revint aux lèvres de Petite, qui s’avança vers lui en jouant.

Laurens agrafa sa robe.

Elle revêtit son domino, et prit sur la cheminée une bougie qu’elle mit dans la main de son mari.

— Éclairez-moi, dit-elle.

Au lieu de prendre le chemin du grand escalier qui descendait à la porte cochère, elle gagna l’appartement de M. de Laurens. Dans le cabinet de celui-ci, il y avait un escalier en colimaçon qui communiquait avec ses bureaux, situés au rez-de-chaussée. Les bureaux avaient une porte sur la rue.

En passant par le cabinet. Petite prit une clef sur la cheminée. Évidemment, ce n’était pas la première fois qu’elle suivait ce chemin.

La clef lui servit à ouvrir la porte de la rue. Avant de sortir, elle tendit la main à son mari.

La main de l’agent de change lui donna froid, comme si elle eût touché un morceau de glace.

— À demain ! dit-elle en sautant gaiement sur le trottoir…

Quand elle fut partie, M. de Laurens resta longtemps à la même place, immobile et pâle comme un spectre.

— Si je la suivais !… murmura-t-il enfin.

Mais il ne bougea pas, et il reprit presque aussitôt :