Aller au contenu

Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 1-2.djvu/57

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Il connaissait un Juif de Francfort, homme d’une probité scrupuleuse, qui se ferait une joie de venir au secours du noble comte, moyennant un bénéfice honnête. — Mosès Geld eut à son tour ses entrées au château.

Et, comme ces prêts à intérêts étaient fort onéreux en définitive, Zachœus Nesmer, sans cesse occupé de l’avantage de son maître, finit par trouver un excellent moyen de le tirer d’embarras. Il proposa, le fidèle serviteur, de consentir une vente sous condition de tous les biens de Bluthaupt, moyennant une rente double du revenu actuel.

L’acquéreur était trouvé, Mosès Geld n’avait rien à refuser au noble comte.

Ce dernier, bien qu’il fût habitué à ne voir que par les yeux de Zachœus, demeura indécis d’abord devant cette mesure extrême. Il aimait à sa manière la jolie Margarethe, qui lui témoignait une affection filiale et accueillait chacune de ses volontés avec une douce obéissance. — D’ailleurs, il espérait toujours un héritier et il se plaisait à penser que ses longs efforts profiteraient à son fils, à ce messie promis par la science infaillible du docteur José Mira…

Mais l’intendant ne s’était point avancé, sans être en fonds d’arguments. Il pouvait, d’ailleurs, comme nous le verrons plus tard, faire toutes sortes de concessions sans risquer sa partie.

— À Dieu ne plaise, dit-il, que je propose à mon gracieux seigneur un contrat qui pourrait blesser les intérêts de la noble comtesse Margarethe et du futur héritier de Bluthaupt ! La rente sera réversible sur la tête de la comtesse dans le cas — et puisse le ciel éloigner ce malheur ! — où elle deviendrait veuve. Quant à la seconde hypothèse, il est bien entendu qu’elle formerait une condition résolutoire… La naissance du fils que nous espérons tous annulerait la vente de plein droit.

— Mais les revenus payés jusque-là par Mosès ? objecta le comte aux trois quarts persuadé.

— La loi romaine est positive à cet égard, répondit Zachœus : — Tout contrat aléatoire expose l’acheteur à la perte des sommes versées dans tel cas donné.

Gunther eût cédé à des raisons moins péremptoires. La première chose