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Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 1-2.djvu/831

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— Ami Hans, dit ce dernier, qui prit un siège, c’est maintenant que je vais avoir besoin de votre aide… Ils sont partis, je suis seul, et le danger que nous croyons évité reparaît plus menaçant… Nous ne connaissions pas encore le plus terrible ennemi de notre Franz.

— N’est-ce pas cet homme qui a voulu le faire assassiner par Verdier ?

— C’est une femme !… une femme qu’il a aimée… qu’il aime peut-être encore…

Hans, qui avait froncé le sourcil avec inquiétude, eut un sourire rassuré.

— Gracieux seigneur, dit-il, ma petite fille a vu Franz hier au soir, et je crois savoir le nom de celle qu’il aime.

— Madame de Laurens ?… commença le baron.

— Mademoiselle d’Audemer, interrompit Hans.

Les traits de Rodach s’éclaircirent un instant.

— Denise, murmura-t-il, je l’ai vue autrefois… Elle me rappelait, enfant, les beaux traits de Margarethe…

— Quand Franz est auprès d’elle, on dirait le frère et la sœur.

— Et ils s’aiment !… reprit le baron à voix basse.

Sa paupière tomba lentement ; il rêvait.

Des idées de bonheur calme et gracieux venaient à la traverse de son inquiétude ; l’avenir dépouillait pour un instant son voile sombre et lui souriait.

Il y avait pour lui dans cet amour quelque chose de charmant et aussi quelque chose de providentiel.

Il lui semblait que la main de Dieu lui-même avait conduit l’un vers l’autre les enfants des victimes : la fille de Raymond d’Audemer et le fils de Margarethe de Bluthaupt.

Une prière ardente jaillit du fond de son cœur ; puis la pensée soucieuse revint plisser son front, qui s’inclina davantage.

— Ce n’est point de Denise que je veux parler, reprit-il ; ami Hans, c’est un sang chaud et hardi qui coule dans les veines de l’enfant… Les vices de sa race bouillante et la jeunesse folle le poussent aveuglément à toutes les joies… Je le connais déjà, comme si je ne l’avais pas quitté d’un jour depuis sa petite enfance… C’est un cœur bon et fier avec une tête