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Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 3-4.djvu/221

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sur les murailles du château et sur les rocs qui lui Bernaient de base.

Depuis le fond du fossé jusqu’au sommet des remparts, il n’y avait pas un pouce de terrain qui n’eût sa blanche étincelle ; tout était illuminé, clair, éclatant ; les saillies du rocher n’avaient plus d’ombres, on apercevait les plus petits objets comme en plein soleil, et c’est à peine si un lézard, habitant les murs demi-ruinés, eût trouvé où se cacher sur cette surface éblouissante.

Pourtant les regards avides cherchèrent en vain les trois grands fantômes avec leurs rouges manteaux.

Ils avaient disparu.

Le précipice était sous leurs pieds ; il n’y avait au-dessus de leurs têtes qu’une rampe infranchissable.

Il fallait que la terre se fût ouverte pour leur donner asile.

. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . .

On s’amusait magnifiquement chez les Geldberg. Ce n’étaient pas de ces financiers dont l’avarice combat sans cesse l’orgueil et qui lancent fastueusement des milliers d’invitations pour laisser ensuite mourir de faim et de soif la cohue malheureuse de leurs hôtes. Ils faisaient les choses grandement, et comme ces traitants prodigues qui ont laissé leurs noms dans les fastes galants de l’ancienne monarchie.

Tout était réglé comme il faut ; l’ennui n’avait pas le temps de se glisser entre les plaisirs échelonnés habilement.

C’était tous les jours quelque chose de nouveau, et, tous les jours, les splendeurs de la veille se trouvaient dépassées.

L’ordonnateur de ces belles fêtes faisaient preuve, en vérité, d’une imagination inépuisable.

Tout le monde était content ; personne ne songeait à hâter l’instant du départ : c’était un succès grand et complet, si grand et si complet, que deux ou trois embryons littéraires, qui étaient parvenus à se glisser parmi la riche foule, avaient la bonté de ne point regretter le confortable de leurs mansardes et les joies quotidiennes de leurs dîners à vingt-cinq sous.

Or, quand ces boutures d’écrivains de génie ne se plaignent pas très-haut, c’est qu’il n’y a pas moyen de se plaindre.