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Page:Féval - Le Fils du diable - Tomes 3-4.djvu/330

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Elle venait de voir ces larges taches bleuâtres qui marbraient le cou et les bras de sa fille.

Elle devint d’abord pâle comme une morte ; puis son front s’empourpra subitement pour faire place aussitôt après à une pâleur plus livide.

Des tressaillements convulsifs agitaient tout son corps et bouleversaient les belles lignes de son visage ; ses yeux brûlaient ; elle était si effrayante à voir, que Batailleur, frappée de crainte, tremblait.

— Je vous avais bien dit… commença-t-elle.

Un geste roide de Sara lui coupa la parole.

Il y eut un long silence, pendant lequel madame de Laurens releva une seconde fois la couverture pour compter avec une sombre attention les meurtrissures qui couvraient le corps de sa fille.

À mesure qu’elle regardait, les muscles de sa figure se détendaient lentement ; ses paupières battirent ; deux larmes ardentes roulèrent sur sa joue.

Ce fut l’affaire d’une seconde ; les larmes se séchèrent et les yeux, de Sara eurent un éclair terrible.

— Qui a fait cela ?… murmura-t-elle d’une voix stridente et brisée.

Batailleur hésitait à répondre ; madame de Laurens lui prit le bras et le serra jusqu’à lui arracher un cri de douleur.

— Qui a fait cela ? répéta-t-elle avec effort.

La marchande balbutia le nom d’Araby.

Les dents de Petite grincèrent ; elle lâcha le bras de Batailleur, où l’empreinte de ses doigts restait marquée.

Nulle plume ne saurait peindre ce qu’il y avait en elle de haine et de colère !

— Araby !… répéta-t-elle, comme si ce nom, abhorré désormais, eût déchiré sa lèvre au passage, Araby !… Araby !!…

Elle appuya ses poings fermés contre son front.

— Tigre !… tigre ! dit-elle avec un furieux élan de rage, et il n’est pas là pour que je me venge !

Ses yeux revinrent vers l’enfant, dont la bouche entr’ouverte exhalait des plaintes faibles, parce que le froid piquait sa poitrine nue.