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Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/162

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Voici quelle était la position de nos personnages. Le chien des Baléares se roulait sur un fauteuil, dans un coin et ressemblait à un manchon. Le cat-fox qui s’était attiré par son naturel féroce les respects de l’angora Kaddour s’asseyait au-devant de la galerie et nettoyait ses pattes avec sa langue. Minette, la fille des gouttières, montrait son museau pie sous l’auguste aisselle de Sa Majesté, et le superbe Kaddour, hérissant les touffes chatoyantes de sa chevelure, faisait la roue sur les genoux de Son Éminence.

Car Son Éminence s’était assise dans la ruelle, pendant que la reine se relevait sur son séant. Madame la comtesse de Pardaillan était seule debout, en dehors de la galerie, à peu près au milieu de la chambre.

La scène était éclairée par une seule lampe suspendue au plafond au moyen d’un réseau de chaînettes dorées.

La reine Anne d’Autriche atteignait, nous l’avons dit, cette période de la vie des femmes qu’on nomme familièrement leur « été de la Saint-Martin. » Le cardinal, qui avait le même âge qu’elle, restait au contraire un jeune homme. Il avait gardé de son ancien métier de soldat diplomate, une tournure dégagée qui, grâce aux habitudes de l’époque, ne jurait point avec sa robe. Il se portait admirablement, dit madame de Motteville, et « avait l’art d’enchanter les hommes. »

Sa moustache était nonpareille ; rien ne résistait à l’éclat un peu félin de ses yeux. Il avait réussi brillamment près des dames, bien que les mémoires du temps l’aient accusé de froideur à