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Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/199

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Puis une terreur lui venait. « Les deux autres étaient en route », en route pour se battre peut-être !

— Ah ! pensait-elle, si je pouvais joindre cet étourdi de Roger, je lui dirais : « Marchez droit ! ou jamais je ne serai votre femme ! »

Et certes, elle pouvait bien lui parler ainsi : la fille de ce coquin de Mitraille était un bon parti pour un page qui se nommait Roger tout court.

Comme elle arrivait à la porte du logis de son père, elle s’arrêta tout à coup étonnée, parce qu’elle entendait des voix de femmes à l’intérieur. Elle avait oublié tout à fait l’avertissement du gardien de la porte, annonçant la présence de deux dames.

— Oui, mon enfant chérie, disait une des deux voix, tu vas avoir cette grande joie ; tu vas embrasser ton frère !

— Madame la comtesse ! murmura Mélise.

— Oh ! comme je l’aimerai ! fit une autre voix, tremblante d’émotion.

— Et Pola ! balbutia Mélise.

Elle n’entra pas. Pourquoi ? Il y a des pressentiments, et toute parole contient autre chose que sa signification propre. Parmi ces mots qu’elle venait d’entendre, Mélise n’avait aucune raison pour découvrir rien qui se rapportât à elle-même. Sa bienfaitrice et celle qu’elle chérissait mieux qu’une sœur, s’entretenaient d’une grande joie : l’héritier de Pardaillan était retrouvé. Madame Éliane avait un fils ; Pola avait un frère. Mélise avait prié Dieu bien souvent pour que cet enfant