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Page:Féval - Le Mari embaumé, 1866, tome 2.djvu/59

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désir passionné que j’ai de vous servir, toi et la comtesse.

Je me trouve entre ces trois hommes qui se guettent et qui se gênent mutuellement. Roger est comme une âme en peine. J’ai beau user d’adresse, il sent la présence des deux autres et me soupçonne déjà peut-être. Pour avoir une explication avec Roger, il faudrait lui dire : Ce beau Gaëtan est ici pour mademoiselle de Pardaillan…

— Oh ! Mélise ! fit Pola offensée.

— Comme tu pleurerais, mignonne, riposta la fillette en souriant, si tu pensais qu’il y fut pour une autre !… Mais veux-tu savoir ? Je crains que tout cela ne finisse par des coups d’épée. Gaëtan et Roger ont le diable au corps quand ils s’y mettent ; et le More… Ah ! vois-tu, le More ! quand il se bat, ce doit être un lion !

Pour en revenir, mes entrevues avec lui ne sont pas à mon avantage. Il m’arrache toujours quelque chose de ce qu’il veut savoir, et moi, de ce que je veux savoir, je n’apprends rien. Ces sauvages ont une prodigieuse adresse.

À la fin de sa première visite, quand j’interrogeai mon père… Écoute, le vin est une bonne chose, mais il ne faut pas en abuser. Mon père avait bu un peu trop. Je n’en pus rien tirer, sinon ces mots prononcés d’une langue épaisse :

« Notre petit Renaud est bel et bien mort. Les coquins ne l’auront pas tué à demi. Mais je donnerais de bon cœur une couple de pistoles à qui me dirait où j’ai vu le More et son visage de cuivre florentin ! »