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Page:Féval - Le chevalier ténèbre, 1925.djvu/83

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une habitude très tyrannique : je voudrais garder seulement quelques prises de mon tabac…

L’évêque se retourna, M. le baron d’Altenheimer était en train de vider dans le petit cornet qu’il venait de fabriquer assez gauchement le contenu de sa splendide tabatière d’or, enrichie de diamants, dont chacun était gros comme un pois. Ayant achevé son transvasement, il glissa la boîte dans la bourse, en ajoutant avec une parfaite simplicité.

— Je vous demande un million de pardons, monseigneur, de vous avoir fait attendre.

La boîte valait trois ou quatre fois la bague. Cela fit grand effet, surtout le petit cornet et le million de pardons. Plus d’un se demandait si ce royaume de Wurtemberg, qui avait l’honneur de posséder la Forêt-Noire dans ses étroites limites, était décidément l’Eldorado.

MM. d’Altenheimer avaient repris leur attitude paisiblement modeste, et l’évêque d’Hermopolis continuait sa quête qui avait produit une fortune.

— Mlle d’Arnheim pour finir, dit Mgr de Quélen, en faisant signe à l’orchestre, dont un musicien se détacha pour aller chercher la virtuose.

Gaston avait à la main son offrande au moment où M. d’Arnheim et sa fille reparaissaient sur l’estrade. Il vit le regard avide du vieillard faire avec rapidité le tour de la salle et s’arrêter, lourd et fixe, sur la porte d’entrée, auprès de laquelle les deux MM. d’Altenheimer étaient seuls.

La commotion éprouvée par M. d’Arnheim fut si violente, qu’il chancela comme un homme qui va tomber à la renverse.

— Eh bien ! marquis ! dit l’évêque dont la bourse restait tendue vers Gaston depuis plusieurs secondes.

— Eh bien ! Gaston ! répéta la princesse qui l’observait.

— Il a donné une pièce blanche, s’écria-t-elle pres-