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Page:Féval - Le chevalier ténèbre, 1925.djvu/91

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plus souvent que par des tuyaux creusés sous terre ; on s’évade la tête haute, le front découvert, le sourire aux lèvres ; on s’évade en saluant avec bienveillance la femme du concierge et en disant au factionnaire : Bonjour, l’ami !

Voilà le fait positif ; en voulez-vous la cause ?

L’esprit humain est fait ainsi : il a la passion de contredire, toute précaution peut, en définitive, se traduire ou se résoudre par cette affirmation : Je ne suis pas un voleur. Cela suffit pour que le constable ou le gendarme ait immédiatement désir et besoin de vous prouver que vous vous trompez.

Dites-lui : Je suis un voleur, il éprouvera la tentation bien naturelle de vous démontrer le contraire.

Ce sont là de graves sujets. Il y avait naguère à Londres derrière Drury-Lane, un endroit fort propre où des gens de l’art enseignaient diverses façons de crocheter une porte sans gâter la serrure ; le cours était à peu de chose près public, et nous avons eu l’honneur d’y assister. Rule Britannia ! C’était l’école primaire, tandis que les considérations qui précèdent appartiennent à l’enseignement supérieur.

Si véritablement le baron d’Altenheimer et monsignor Bénédict étaient les frères Ténèbre, ils avaient usé du procédé Marshall. Seulement, comme les bandits allemands attendent encore leur Plutarque, ils avaient été obligés de faire eux-mêmes leur réputation dans les salons de l’archevêque et de chanter leur propre épopée. Puis ils s’étaient écriés, selon la recette de l’honorable Josuah J, Marshall : Nous sommes les frères Ténèbre !

Et personne ne l’avait cru.

Ils n’avaient pas dit cela en propres termes assurément, mais ils s’étaient arrangés de manière que cette pensée vint à tout le monde.

Et tout le monde, en effet, à un moment donné, avait eu cette pensée, mais tout le monde s’était dit